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Workplace Trends : droit à la déconnexion, mythe ou réalité ?


Présentéisme, surcharge numérique, e-mails nocturnes… Derrière la promesse d’un meilleur équilibre de vie, le droit à la déconnexion reste souvent qu’un principe théorique. Une étude menée par Indeed et Censuswide met en lumière un écart persistant entre le discours et les pratiques.

Cinq ans après la crise sanitaire, les nouveaux modes et lieux de travail n’ont pas effacé certaines habitudes décriées par les salariés. Le présentéisme, en particulier, semble regagner du terrain. Selon l’étude d’Indeed, 39 % des salariés interrogés restent tard au bureau pour démontrer leur engagement, chiffre qui grimpe même à 62 % chez les 16-24 ans. Dans cette logique, près d’un salarié sur deux (48 %) estime que la présence compte plus que les résultats. Ce sentiment est encore plus marqué chez les hommes pour 51 % d’entre eux, que chez les femmes pour 46 % des répondantes.

Dans le même temps, la frontière entre vie pro et vie perso continue de s’effacer : 24 % des répondants lisent leurs e-mails pendant les vacances et 16 % tard le soir. Une pratique qui n’est pas sans conséquence : plus d’un salarié sur deux (52 %) juge que l’équilibre de vie est négligé par son entreprise. Et ils sont 22 % à recevoir encore des mails professionnels une fois leur journée terminée, entretenant un état de vigilance permanente.

Une surcharge numérique

L’étude pointe aussi une autre tendance : la sur-communication par écrit. Cette tendance fait écho à ce que relevait dernièrement la Dares parmi les conséquences du télétravail facteurs de risques psychosociaux. Près d’un salarié sur cinq (17 %) se déclare stressé par le volume d’e-mails reçus, un taux qui monte à 20 % chez les plus de 55 ans. Les jeunes générations (16-24 ans) se sentent elles aussi concernées, 33 % trouvent que leurs collègues privilégient trop l’e-mail au téléphone, y compris pour des sujets simples.

Ce mode de communication renforce la sensation d’urgence permanente et la difficulté à « décrocher ». Au point que 29 % des salariés considèrent aujourd’hui le droit à la déconnexion comme un critère décisif lorsqu’ils envisagent un nouvel emploi.

Des engagements encore peu suivis d’effets

Si 74 % des recruteurs affirment que le droit à la déconnexion est devenu une priorité, seuls 42 % des salariés constatent des actions concrètes dans leur entreprise. Plus préoccupant encore, 42 % estiment que leur manager ne respecte pas ce droit, malgré les engagements formels de l’organisation.

Des écarts sectoriels viennent nuancer cette tendance : 84 % des recruteurs du secteur de la santé considèrent la déconnexion comme prioritaire, contre seulement 66 % dans les secteurs du commerce, de la restauration, des loisirs et du transport.

Dans l’ensemble, 13 % des recruteurs interrogés admettent attendre de leurs collaborateurs qu’ils restent joignables en dehors des heures de travail. Un chiffre révélateur, auquel s’ajoutent 21 % de recruteurs qui préfèrent ne pas se prononcer, témoignant d’un certain flou sur la question.

Les mesures mises en œuvre varient : 39 % des entreprises rappellent régulièrement aux managers de ne pas solliciter leurs équipes hors horaires, 36 % fournissent des téléphones professionnels, et 33 % ont instauré des politiques de travail flexibles. Mais l’efficacité concrète de ces initiatives reste encore à démontrer.

Vers une culture du travail plus durable ?

Pour Eric Gras, spécialiste du marché de l’emploi chez Indeed France, il est temps de passer des intentions aux actes : « Le respect du droit à la déconnexion, la lutte contre le présentéisme et la gestion de la surcharge numérique ne doivent plus rester des intentions… mais devenir les piliers d’une culture du travail durable, humaine et respectueuse. »

Pour rester attractives, les entreprises ne peuvent plus se contenter de paroles symboliques. Elles doivent aligner discours et pratiques, pour préserver la confiance et la motivation de leurs équipes.