Stratégies

Cyril Pouet : « La digitalisation doit aboutir à une réduction du temps sans valeur ajouté »

Par Alexandre Foatelli | Le | Digitalisation

De la même façon que notre manière de travailler s’est digitalisée à marche forcée, le Facility Management a vu ses mœurs bousculées par le recours massifs aux outils technologiques et, surtout, face à de nouvelles attentes de la part des usagers. Cyril Pouet, directeur général de Spie Facilities, livre le regard d’un acteur incontournable du secteur sur les évolutions en marche.

Cyril Pouet, directeur général de Spie Facilities - © Spie Facilities
Cyril Pouet, directeur général de Spie Facilities - © Spie Facilities

Deux ans après le début de la pandémie de Covid-19, la digitalisation du Facility Management s’est-elle imposée ?

D’abord, la crise sanitaire a remis le Facility Management dans son ensemble au cœur des préoccupations des entreprises. En parallèle, ce contexte a précipité la digitalisation du secteur, qui était déjà en marche, et il a surtout ouvert le champ des possibles. Ainsi, des outils technologiques qui étaient jusqu’à lors des compléments sont désormais centraux dans nos activités, et sont devenus des besoins exprimés par les utilisateurs des bâtiments.

Pour les utilisateurs, justement, quels éléments sont devenus incontournables ?

La principale adaptation à venir, c’est l’hybridation des modes de travail entre présentiel et distanciel. Si certaines entreprises ont choisi un mode de fonctionnement clair, d’autres sont encore en recherche. Dans tous les cas, le sujet est sur la table, et il est nécessaire d’adapter l’offre de services. Sans cela, l’hybridation ne peut se faire dans de bonnes conditions. Venir au bureau nécessitera, par exemple, de savoir si on peut le faire lorsque l’entreprise définit une jauge maximale, de savoir si un poste sera bien disponible, si tel ou tel collègue sera bien présent.

Sans une adaptation de l’offre de services, l’hybridation des modes de travail ne peut se faire dans de bonnes conditions.

En matière de services, ce nouveau rapport à l’espace de travail entraîne une attente de la part de nos clients : l’adaptation en fonction du besoin réel. C’est le cas notamment pour les prestations de propreté.

Concrètement, comment s’adapter à une telle variation du besoin selon les jours ?

Sur ce point, le champ du possible est très vaste. Des capteurs sont capables de comptabiliser les entrées et les sorties dans un immeuble, ou même peuvent indiquer le nombre d’utilisateurs présents en temp réel. Mais il est vrai que ces outils demandent des adaptations un peu lourdes. En revanche, nous pouvons aussi optimiser des technologies plus légères, comme les indicateurs de qualité de l’air. Ceux-ci sont préconisés dans le cadre des dernières mesures sanitaires, et ils permettent notamment de connaître le taux de CO2. Cette donnée aide ensuite à déterminer le niveau de présence dans les immeubles, moins précisément qu’un capteur dédié, mais suffisamment pour juger la nécessité de déclencher une prestation de ménage, par exemple.

Comment placez-vous le curseur entre la digitalisation du secteur et le travail humain ?

A mon sens, la digitalisation devrait rendre la prestation humaine plus qualitative. Pour nos opérants, les nouveaux outils technologiques leur évitent désormais de se déplacer sur site pour rien, ou de ne pas avoir la bonne information sur la prestation à effectuer. En outre, disposer de l’ensemble de l’historique des interventions sur un matériel leur permet aussi d’être plus efficaces dans leur métier. La digitalisation doit aboutir à une réduction du temps de travail sans valeur ajoutée pour nos collaborateurs.

Selon vous, quelles seraient les futures grandes étapes à venir en matière de digitalisation du FM ?

Je pense que l’utilisateur va devenir de plus en plus acteur dans les années à venir. Dans un contexte où la dimension RSE est devenue encore plus prégnante, les usagers d’un bâtiment sont notamment demandeurs de reportings efficaces et d’être associés aux actions concrètes visant à améliorer les performances énergétiques.

L’utilisateur va devenir de plus en plus acteur dans les années à venir.

Il y a encore cinq ou dix ans, nos clients voulaient principalement faire des économies financières sur leurs consommations. Désormais, 80 % d’entre eux placent leur empreinte carbone au centre des préoccupations. Celle-ci est devenue un enjeu de marque employeur et un vecteur de sens pour les salariés.

SPIE Facilities y contribue en installant partout où c’est possible des systèmes de management de l’énergie, rendant ainsi facilement accessible à nos clients leurs consommations par bâtiment, par zone, par usage, mais surtout l’impact des actions que nous mettons en œuvre conjointement. Nous développons depuis 2017 une plateforme baptisée Smart FM 360, qui a pour ambition de devenir un référentiel commun pour tous les prestataires afin d’interconnecter tout ce qui a vocation à l’être : nos solutions, celles du client (ticketing, GTC ou GTB) et celles du prestataire de propreté et/ou de sécurité. Le but est que toutes les données de ces outils puissent être remontées par le gestionnaire de l’immeuble selon ses besoins.

Des projets sont-ils en route chez SPIE Facilities pour 2022 ?

Nous allons lancer la GOODCose, une offre autour de l’efficacité énergétique, sur le volet serviciel, en complément des solutions techniques que nous délivrons déjà. Celle-ci se décline par des Totems de l’efficacité énergétique et du RSE, des objets physiques placés dans les halls d’accueil, qui permettront de rendre tangibles auprès des utilisateurs des éléments qui ne le sont pas naturellement en termes d’impacts environnementaux, afin d’impulser une émulation collective.

Dans un second temps, nous proposerons un ensemble de challenges internes au sein des entreprises, que nous animerons, permettant de sensibiliser les usagers et de les rendre acteurs de la performance environnementale. Il peut s’agir, par exemple, d’une journée sans pièces jointes dans les mails, de baisser la température des locaux de 2°C ou d’une heure sans électricité. L’ensemble doit fédérer les occupants autour de l’enjeu de transition environnementale. Le déploiement de ce nouveau service va se faire tout au long de l’année 2022 partout en France.