Julien Poron (DHL) : « Le salaire n’est pas le premier levier de rétention de nos collaborateurs »
Par Alexandre Foatelli | Le | Qvt
Dans une période de forte tension sur le marché du travail, DHL Express est en passe de réussir son objectif de 800 recrutements en 2022. Républik Workplace Le Média a interrogé Julien Poron, responsable recrutement France du géant de la logistique, pour connaître la recette de son attractivité.
En 2022, DHL a investi 12 millions d’euros notamment pour améliorer le service aux clients et le confort de ses équipes. Comment se matérialise ces investissements concrètement ?
Le confort des salariés ne se résume pas à acheter des fauteuils Chesterfield ! La première nécessité, c’était d’agrandir les espaces de travail afin d’offrir aux collaborateurs la place nécessaire, notamment sur les sites confrontés à une augmentation des volumes d’activité. Lorsque l’on parle de confort des équipes dans nos agences, c’est d’abord d’éviter d’avoir tout simplement des colis qui trainent au sol ou entassés à droite, à gauche par manque de place. Cela passe donc par un agrandissement et réaménagement de nos agences afin de donner plus d’espace aux manutentionnaires.
Le confort des salariés ne se résume pas à acheter des fauteuils Chesterfield !
Par ailleurs, nous avons mis en place de nouvelles machines de tri, notamment pour limiter les mouvements pour se baisser, et réduire ainsi la pénibilité du travail. Cette automatisation ne s’est pas faite au détriment de la main d’œuvre. Au contraire puisque nos effectifs sont passés de 2 000 à plus de 3 500 salariés en dix ans. C’est une automatisation heureuse, au service des collaborateurs.
De manière générale, considérez vous que la logistique soit un secteur difficile à pourvoir en main d’œuvre ?
DHL jouit d’une position attractive au sein du secteur de la logistique : les candidats qui viennent sont du métier ont une bonne image de l’entreprise. En revanche, il est vrai qu’historiquement la logistique pâtissait d’un manque de notoriété et d’une forme de mauvaise presse, particulièrement sur les postes de commerciaux ou de conseillers clientèle. Cependant, la crise sanitaire a donné un coup de projecteur et le grand public a pu mesurer l’importance criante de notre métier et lui donner du sens. Cela contribue à rendre la logistique en général plus attractive. Cela étant, nous faisons face à la tendance générale du marché de l’emploi très tendu, ou le rapport de force est du côté des candidats, qui nous impose d’avoir une démarche de recherche active. Poster une annonce ne suffit plus à pourvoir un poste.
A l’échelle de DHL, que mettez vous en place pour attirer les talents ?
Nous menons un profond travail de communication sur les valeurs de l’entreprise, qui sont les mêmes depuis la création de DHL en 1969.
Chez DHL Express, le salaire n’est pas le premier levier de rétention de nos collaborateurs.
Notre politique de rétention des collaborateurs est en place depuis 2010. Elle passe notamment par des formations au management centrées sur le participatif, car notre volonté est de solliciter les collaborateurs dans les prises de décisions. En outre, nous encourageons des actions concrètes et caritatives, à l’instar de notre programme GoGreen, qui regroupe toutes nos initiatives de réduction de l’empreinte carbone de nos activités.
Cela a-t-il vraiment un impact sur le recrutement ?
Tout à fait ! Il est erroné de croire que les manutentionnaires se fichent de savoir ce que l’entreprise fait pour diminuer son impact environnemental. Encore plus dans un secteur comme la logistique, qui figure parmi les plus gros pollueurs, en particulier à cause du transport aérien. Chaque jour DHL Express fait voler 320 avions dans le monde. Sur ce point, nous sommes tributaires des constructeurs qui recherchent actuellement des alternatives décarbonées. Toutefois, nous avons, il y a un an maintenant, passer une commande de 12 avions 100 % électriques auprès de la société Eviation : une première mondiale ! Nous agissons également sur la logistique du dernier kilomètre, où nous investissons pour que la totalité de notre flotte légère bascule en électrique. On ne peut pas donner le sentiment à nos collaborateurs qu’ils travaillent pour un fossoyeur de la planète, qui ne fait rien pour changer les choses.
Dans un contexte inflationniste, quid de la politique des salaires chez DHL ?
Chez DHL Express, le salaire n’est pas le premier levier de rétention de nos collaborateurs. Néanmoins, nous avons chaque année des négociations annuelles obligatoires (NAO) avec des revalorisations. En 2021, l’augmentation pour les non-cadres était de 3,45 % et de 1 % sur la grille des salaires (pour les nouveaux entrants).
On ne peut pas donner le sentiment à nos collaborateurs qu’ils travaillent pour un fossoyeur de la planète.
Cette année, nous avons augmenté la grille des salaires de 6 % et les salaires des non-cadres de 3,5 %. Les négociations sont en cours pour 2023, mais il devrait y avoir à nouveau une revalorisation. De plus, avec l’application du management collaboratif, les perspectives d’évolutions de carrière pour les entrants sont réellement tangibles, ce qui permet de s’inscrire dans la durée et d’espérer grimper sur l’échelle des salaires. Pour preuve, nous affichons une ancienneté moyenne au T3 2022 de 11 ans, ce qui est assez remarquable pour une entreprise logistique.
Quels sont vos objectifs de recrutements pour 2023 ?
Nous projetons de recruter 600 personnes sur le territoire et d’investir 24 millions d’euros d’investissements pour renforcer le réseau opérationnel. Nous ouvrirons deux nouvelles agences à Toulouse et Marne-la-Vallée, qui sont en réalité des réaménagements complets d’agences existantes.