Stratégies

Gaëlle Salaün (EDF) : « L’immobilier est un outil d’attractivité important pour le recrutement »


Directrice de l’Immobilier d’EDF depuis mars 2024, Gaëlle Salaün œuvre pour que le patrimoine de 3 millions de mètres carrés devienne, entre autres, un véritable outil de recrutement. Face aux enjeux d’attractivité des jeunes générations et aux défis du télétravail et de la décarbonation, elle fait de l’immobilier d’entreprise un levier stratégique pour accompagner la croissance du groupe.

Gaëlle Salaün occupe la tête de la Direction Immobilier d’EDF depuis mars 2024. - © D.R.
Gaëlle Salaün occupe la tête de la Direction Immobilier d’EDF depuis mars 2024. - © D.R.

Vous avez pris la direction de l’immobilier d’EDF en mars 2024, après une carrière plutôt dans la relation client. Comment cette expérience nourrit votre vision de l’immobilier d’entreprise ?

J’ai pris la tête de la Direction Immobilier depuis plus d’un an, après près de 20 ans au sein du groupe dans différentes directions. Dans le cadre de ces fonctions, j’ai été amenée à exercer des responsabilités managériales relativement importantes qui, au-delà des activités que je devais réaliser, comprenaient des dimensions de transformation, d’organisation et de réorganisation. Des évolutions dans lesquelles l’immobilier trouvait toujours une place importante, parce que nous faisions évoluer les métiers et les conditions dans lesquelles ils s’exerçaient, ce qui supposait de transformer l’aménagement des environnements de travail. En tant qu’utilisateur, je me suis donc réellement rendu compte de l’importance que jouait l’immobilier dans la réalisation des activités d’une entreprise et dans la performance.

Par ailleurs la relation client était un pilier dans le cadre de mes dernières fonctions. Je peux m’appuyer sur ces expériences, car la relation aux clients est également un enjeu important dans notre métier d’immobilier. La relation que nous avons avec les occupants, avec les différents métiers et la posture que nous avons vis-à-vis d’eux, à travers l’écoute de leurs besoins et l’identification de leurs problématiques, est un atout dans la réalisation de mon métier au quotidien. En outre, même si cela commence à faire loin, j’ai eu une formation d’ingénieur dans le domaine du Génie Civil, qui m’a donné une formation de base et une sensibilité importante aux infrastructures.

La Direction Immobilier d’EDF gère un patrimoine de 3 millions de mètres carrés, 400 sites et 10 800 logements. Quels sont vos axes prioritaires ?

Aujourd’hui, nous avons deux axes stratégiques. D’un côté, nous devons accompagner le groupe dans ses grands projets de développement du parc de production, des centrales qui se prolongent, de nouvelles centrales et le développement commercial… il y a une forte demande pour mettre à disposition des environnements de travail adaptés pour accueillir les équipes qui vont contribuer à ce développement. Cette mission doit se faire en ayant une bonne maîtrise des coûts et des délais pour être efficient.

Le deuxième enjeu se situe dans l’attractivité des espaces de travail, dans un contexte où les managers ont la volonté de faire venir leur équipe sur site. Cette quête d’attractivité implique aussi la mise à disposition des logements pour les salariés qui sont à proximité des centres de production : il s’agit de mettre à disposition un parc qui soit optimisé et qui permette aux métiers qui en ont besoin d’en disposer dans de bonnes conditions.

L’immobilier est donc concrètement devenu un outil d’attractivité pour EDF ?

Nous observons aussi que les jeunes générations accordent une importance accrue à la qualité des espaces de travail.

L’immobilier peut être extrêmement important dans un cadre de recrutement à l’externe, et même dans le cadre de mobilité interne. Il est vrai que les environnements de travail doivent désormais offrir des possibilités de travailler dans des espaces collaboratifs, afin de favoriser la coopération et l’innovation. Nous observons aussi que les jeunes générations accordent une importance accrue à la qualité des espaces de travail, ce qui impose aux Directions Immobilier d’être attentive à ces enjeux.

Quelle est justement l’organisation du travail pour les sites tertiaires chez EDF ?

Nous avons un accord de télétravail applicable pour l’ensemble du groupe, qui définit les modalités. L’idée, c’est de l’associer à une nouvelle façon de travailler, et de manager autrement. En parallèle de cela, nous avons élaboré un référentiel d’aménagement qui définit la manière dont nous organisons les lieux de travail, basé sur la mise en place du flex office, et d’espaces collaboratifs, de restauration ou mixtes en fonction des besoins des métiers. En somme, l’attractivité est régie par ces deux politiques : c’est la fusion des deux qui nous permet de définir des environnements de travail performants.

Ce référentiel est-il en cours de déploiement ?

Il existe depuis plusieurs années, mais nous le mettons en œuvre au fur et à mesure du renouvellement de nos implantations. Lorsque nous devons absorber une évolution d’effectifs sur un site, nous allons réaménager pour passer en espace dynamique. Quand nous emménageons sur un nouveau site, nous appliquons ce référentiel. En revanche, il existe aussi de nombreux de bâtiments où il n’y a pas d’opportunité, parce que les coûts d’aménagement ne rendent pas l’opération viable économiquement. C’est donc une application au cas par cas, en fonction de la rotation de notre parc immobilier.

Concernant la décarbonation de l’immobilier avez-vous fixé des objectifs ? Que mettez-vous en place ?

Il s’agit effectivement d’un sujet important pour EDF, conformément à la raison d’être du groupe. D’abord, nous visons la conformité à la réglementation, nous sommes vigilants concernant la consommation énergétique de nos bâtiments avec une ambition que nous nous sommes donnés à une certaine échéance. En complément, nous calculons également les émissions de CO2 de notre parc tertiaire du point de vue de la consommation énergétique et des sources d’alimentation de nos sites (électricité ou gaz).

Depuis fin 2023, EDF et La Poste Immobilier ont conclu un partenariat pour décarboner le parc immobilier postal. Est-ce que cette approche de partenariat peut faire partie de la stratégie pour votre propre patrimoine ?

Du côté d’EDF, nous sommes essentiellement locataires de notre parc, ce qui limite les marges de manœuvre pour faire évoluer en profondeur tout ce qui est bâti.

En effet, c’est un partenariat entre Dalkia et d’autre filiales d’EDF et La Poste Immobilier pour les aider à décarboner, sachant que cela va concerner essentiellement le patrimoine immobilier dont La Poste est propriétaire. Du côté d’EDF, nous sommes essentiellement locataires de notre parc, ce qui limite les marges de manœuvre pour faire évoluer en profondeur tout ce qui est bâti. Nous ne pouvons donc pas appliquer la même démarche que celle qui est déployée pour La Poste.

Quel est votre regard sur l’innovation technologique dans l’immobilier ?

La vision que nous portons se décline en deux approches. La première consiste à mettre la data au cœur de notre activité et de maîtriser correctement les données dans nos processus afin de pouvoir s’appuyer sur des outils efficaces. Dans un groupe avec des activités très variées, des directions très réparties, s’assurer que nous partageons les mêmes caractéristiques sur nos datas représente un enjeu très important. La définition de standards numériques est nécessaire pour aller vers l’harmonisation et la coordination dans l’utilisation des outils techniques.

Ensuite, nous réfléchissons aussi au développement de l’intelligence artificielle (IA) au sein de nos activités. Nous sommes encore à l’étape de réflexion sur les applications que l’IA peut trouver, que ce soit sur des niveaux simples ou des usages plus approfondis. La finalité étant pour l’instant d’optimiser nos process métiers pour gagner en efficacité au quotidien.

En tant que jurée de la Nuit de l’Immo que retenez-vous des candidats de cette année ?

Ce que j’en retiens d’abord, c’est la surprise de constater la variété d’offres qu’il peut y avoir aujourd’hui sur l’immobilier flexible, et avec des approches très différentes qui peuvent répondre à des besoins variés. Sur les opérations immobilières, j’ai trouvé que les projets présentés cette année affichaient un certain pragmatisme et un retour aux fondamentaux de l’immobilier d’entreprise. Cela tranchait selon moi avec des projets plus ostentatoires en lice lors de l’édition précédente.

En même temps, il y avait parmi les candidats l’année dernière plus d’opérations de reconversion. Dans le contexte actuel, les réflexions sur la nécessité de reconvertir l’existant sont récurrentes, notamment sur le tertiaire. Est-ce que la moindre représentation de ces opérations cette année illustre la difficulté à mener des projets significatifs ?


Gaëlle Salaün fait partie du jury de la Nuit de l’Immo 2025. En attendant la révélation du palmarès lors du Gala du 30 juin au Pré Catelan, vous pouvez voter pour votre favori pour le Prix du public. Découvrez le résumé des candidats et déposez votre voix ici.